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Michaux, Henri

Poésie pour pouvoir. 1949. Édition originale. Un des 15 exemplaires hors commerce. Exemplaire de Dubuffet, avec un double envoi. Dans une rare reliure en bois clouté.

Lot closes

June 19, 02:24 PM GMT

Estimate

4,000 - 6,000 EUR

Current Bid

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Lot Details

Description

Michaux, Henri

Poésie pour pouvoir.

Paris, René Drouin, 1er février 1949.


Grand in-4 (388 x 285 mm). En feuilles, couverture illustrée du report du linoléum. Dans une reliure en bois de teck à charnières, ornée de gros clous à tête carrée disposés selon un motif inspiré par celui de la couverture. Chemise et étui toilé. 


Exemplaire de Jean Dubuffet, avec un double envoi.

Rare reliure cloutée.


Édition originale. Mise en page de Michel Tapié. Texte entièrement gravé sur linoléum par Tapié.


Frontispice original de Michaux. 22 linogravures originales de Michel Tapié.

 

Un des 15 exemplaires hors commerce (justifié L/O), d’un tirage annoncé à 46 exemplaires : on pense que moins d'une dizaine d'exemplaires seulement ont bénéficié d'une telle reliure à clous.

Signé par Michaux et Tapié à la justification.

 

Double envoi autographe signé à Jean et Lily Dubuffet :

"A mon ami

A Jean Dubuffet

… pour sa semaine de bonté

Henri Michaux".


"pour vous, Jean, cette contribution

A un poème particulièrement tonique

De notre ami ‘Mr Plume, pli au pantalon’

M. Tapié".


Avec apostille de la main de Michaux, signée des deux auteurs :

"et à Lily

Henri M

Michel".


Livre édité par René Drouin, qui avait organisé la première exposition personnelle de Dubuffet, en 1944.

Deux hommes jouèrent un rôle essentiel dans la confection d'un tel livre clouté. Le marchand et éditeur d'art René Drouin, le premier à avoir exposé les œuvres de Michaux avec audace ; et surtout l'artiste, proche de la galerie Drouin, Michel Tapié. Défendant l'art informel, militant pour une peinture du geste et du signe (Dubuffet, Pollock), Tapié fut tout de suite saisi par l'efficacité presque magique du texte de Poésie pour pouvoir et voulut l'éditer. Le problème consistait à fabriquer un objet receleur de force supportant ce texte, de sorte que sa vue, son contact tant épidermique que musculaire provoquent au maximum l'expansion collective de cette force, écrit-il. Mais des difficultés matérielles, dues au projet d'une reliure en bois clouté, ramenèrent les prévisions du tirage à la baisse. Sur les quarante-six exemplaires cités à la justification, seuls quatre à huit furent exécutés, sans suivre l'ordre des numéros du tirage. Dans l'atelier-garage familial, René Drouin, sa femme et son fils coupèrent et disposèrent eux-mêmes les clous.

Cet exemplaire est orné de 61 clous : beaucoup plus que les autres exemplaires répertoriés. L’exemplaire n° 1, avec le dessin original, en présente 59 (Sotheby’s, Bibliothèque Gwenn-Ael Bolloré, 2002, lot 92), les deux exemplaires mentionnés dans l'édition Pléiade (n° VI et XXX) n'en comptent que 32 et 33.

Plus tard, le libraire Petitory fit faire quelques reliures semblables mais la plupart des exemplaires de cette édition restèrent en feuilles.


Sur Dubuffet et Michaux, voir aussi lot 73 (lettres de Dubuffet à Michaux), 142, 145 et 147 (éditions de Michaux avec envoi à Dubuffet ou lettres de Dubuffet).

Imbert, 34.


Sandrine Thiry, "Michaux et Dubuffet : rencontre de deux hommes du commun", in Henri Michaux, corps et savoir, sous la dir. de Pierre Grouix et Jean-Michel Maulpoix, ENS, 1987, p. 297-324, résumé de l'article, en ligne : https://books.openedition.org/enseditions/21075?lang=fr

Deux hommes du commun. Michaux et Dubuffet se rencontrent à la fin de l'année 1944, après que Dubuffet ait sollicité Marie-Louise Michaux, qui tenait la galerie André rue des Saints-Pères, pour y exposer ses lithographies. Immédiatement séduit par les peintures de Dubuffet, Michaux écrit à Paulhan : "Vu exposition Dubuffet. Plein de qualités de peintre ce Dubuffet. J'ai été conquis. Depuis, je me reprends... un peu" (Pléiade, I, p. CXXIV). Ils furent très proches dans les années d'après-guerre, au point de passer Noël 1946 ensemble (I, p. CXXVIII). En 1947, Dubuffet note, à propos d'un déjeuner avec Michaux et Bertelé : "Michaux a été épatant ; il s'amusait à haricoter Léautaud ; il haricotait épatement, il avait toujours le dernier mot, il était extrêmement drôle, il était en très bonne forme et bonne humeur". En octobre 1947, l'exposition de Dubuffet à la galerie Drouin "Les gens sont bien plus beaux qu'ils croient / Vive leur vraie fugure", sont montré 7 des 9 portraits que le peintre a réalisés de son ami "et de monsieur Plume". Le mois suivant a lieu la création du Foyer de l'Art Brut : si ce n'est que plus tard que Michaux manifestera son intérêt pour l'entreprise, le poète ne pouvait être que très proche de cet univers, ainsi que le note R. Bellour et Y. Tran : son intérêt pour "les enfants, les fous, les primitifs...", l'influence de Paul Klee, et sa approximé avec Dubuffet à cette époque. En 1949, Dubuffet publie un croquis-portrait de Michaux titré : "Henri Michaux garçon triste (et génial) à tête de poussin écrit, dessine et chante des rêves". En 1952, Michaux et Dubuffet participent à une exposition collective au studio Paul Facchetti, avec Ossorio, Appel ou Pollock. La folie, au centre du concept d'Art Brut, inspire cette lettre à Dubuffet, après sa lecture de Connaissance par les gouffres en 1961 : "Il est traité de folie magistralement, vous la donnez à vivre. Elle est bien tentante. Il en est d'elle comme tout chose, elle donne à perdre par un bout, mais à gagner par un autre. Elle n'est pas comme on le croit une valeur négative. Il n'y a pas de valeurs négatives. Je m'émerveille du courage de vos expériences, et de leur cours opiniâtre." (III, p. XV). En juin 1965, Michaux devient membre officiel de la Compagnie de l'Art brut de Dubuffet, qui lui écrit : "Il faut que vous aimiez bien l'Art brut, mon cher Michaux, pour consentir si gentiment à cette position de sociétaire, et je saisis pleinement le prix de cette décision" (III, p. XXVII).


"En effet une véritable communauté d’esprit se dessine dans ce simple geste de « graver », tant au niveau de la peinture qu’au niveau de la littérature. Ce qui unit les deux créateurs avant tout, c’est sans doute la conviction que l’art (pictural, poétique) ne donne pas à l’homme toute sa place, qu’au contraire il fige ce dernier dans un carcan aliénant qui ne rend compte en aucune façon de sa complexité. Des « positions anti-culturelles » vont alors les amener, chacun à sa façon, à proposer une représentation nouvelle d’un homme qu’ils annoncent tous deux « faible », « inadapté » mais pourtant merveilleusement multiple, changeant, riche de ressources. L’intérêt majeur de cette nouvelle représentation est de préférer à un espace vertical – celui du mot d’ordre et de la métaphore aussi un espace horizontal – métonymique. Que ce soit de la (dé) composition de portraits par contiguïté chez Dubuffet ou par l’épanchement du pigment réaliste dans l’eau songeuse chez Michaux, c’est à un véritable éloge de l’individu « du commun » rendu à sa présence réelle – au milieu des fourmis et des 'antennes vibrantes' – qu’aboutissent nos deux peintres et / ou écrivains." (Sandrine Thiry).

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